Plongeons nages pour le désencombrement des images


Contre les alvéoles 
contre la colle 
contre la colle les uns les autres
 contre le doux les uns les autres

Cactus !
 Flammes de la noirceur 
impétueuses
 mères des dagues 
racines des batailles s’élançant dans la plaine

Course qui roule
 rampement qui bout
unité qui fourmille 
bloc qui danse

Un défenestré s’envole 
un arraché de bas en haut
 un arraché de partout 
un arraché jamais plus rattaché

Homme arcbouté
 homme au bond 
homme dévalant 
homme pour l’opération éclair
 pour l’opération tempête 
pour l’opération sagaie 
pour l’opération harpon 
pour l’opération requin
 pour l’opération éclatement

Homme non selon la chair
 mais par le vide et le mal et les torches intestines 
et les bouffées et les décharges nerveuses
 et les revers 
et les retours
 et la rage
 et l’écartèlement
 et l’emmêlement
 et le décollage dans les étincelles

Homme non par l’abdomen et les plaques fessières ou les vertèbres 
mais par ses courants, sa faiblesse qui se redresse aux chocs, ses
 démarrages 
homme selon la lune et la poudre brûlante et la kermesse en soi du 
mouvement des autres
 et la bourrasque et le vent qui se lève et le chaos jamais ordonné Homme tous pavillons dehors, claquant au vent bruissant de ses pulsions 
homme qui rosse le perroquet
 qui n’a pas d’articulations
 qui ne fait pas d’élevage 
homme-bouc
homme à crêtes 
à piquants 
à raccourcis
 homme à huppe, galvanisant ses haillons 
homme aux appuis secrets, fusant loin de son avilissante vie

Désir qui aboie dans le noir est la forme multiforme de cet être 
Élans en ciseaux
 en fourches 
élans rayonnés élans sur toute la Rose des vents

Aux bruits 
au rugissement, si l’on donnait un corps !…
 Aux sons du balafon et à la foreuse perçante 
aux trépignements adolescents qui ne savent encore
 ce que veut leur poitrine qui est comme si elle allait éclater 
aux saccades, aux grondements, aux déferlements 
aux marées de sang dans les artères tout à coup changeant de sens 
à la soif
 à la soif surtout
à la soif jamais étanchée 
si l’on donnait un corps !…

Ame du lasso 
de l’algue 
du cric, du grappin et de la vague qui gonfle 
de l’épervier, du gnou, de l’éléphant marin 
âme triple âme excentrée 
âme énergumène 
âme de larve électrisée venant mordre à la surface 
âme des coups et des grincements de dents 
âme en porte à faux toujours vers un nouveau redressement

Abstraction de toute lourdeur
 de toute langueur 
de toute géométrie
 de toute architecture
 abstraction faite : VITESSE !

Mouvements d’écartèlement et d’exaspération intérieure plus que mouvements de la marche 
mouvements d’explosion, de refus, d’étirement en tous sens 
d’attractions malsaines, d’envies impossibles 
d’assouvissement de la chair frappée à la nuque
mouvements sans tête
 A quoi bon la tête quand on est débordé ? Mouvements des replis et des enroulements sur soi-même en attendant mieux 
mouvements des boucliers intérieurs 
mouvements à jets multiples 
mouvements résiduels
 mouvements à la place d’autres mouvements qu’on ne peut montrer 
mais qui habitent l’esprit de poussières 
d’étoiles
 d’érosion 
d’éboulement s
et de vaines latences…

Fête de taches, gamme des bras 
mouvements on saute dans le « rien »
 efforts tournants 
étant seul, on est foule
 Quel nombre incalculable s’avance 
ajoute, s’étend, s’étend !
 Adieu fatigue adieu bipède économe à la station de culée de pont
 le fourreau arraché, on est autrui
 n’importe quel autrui
 on ne paie plus tribut
 une corolle s’ouvre, plongée sans fond…

La foulée désormais a la longueur de l’espoir
 le saut a la longueur de la pensée 
on a huit pattes s’il faut courir
 on a dix bras s’il faut faire front
on est tout enraciné, quand il s’agit de tenir 
jamais battu
 toujours revenant
 nouveau revenant tandis qu’apaisé le maître du clavier feint le sommeil !

Taches 
taches pour obnubiler
 pour rejeter
 pour désabriter
 pour instabiliser 
pour renaître 
pour raturer
 pour clouer le bec à la mémoire
 pour repartir

Bâton fou 
boomerang qui sans cesse revient 
revient torrentiellement
 à travers d’autres 
reprendre son vol…

Gestes 
Gestes de la vie ignorée 
de la vie impulsive 
et heureuse à se dilapider 
de la vie saccadée, spasmodique, érectile
 de la vie à la diable, de la vie n’importe comment
 de la vie
 Gestes du défi et de la riposte 
et de l’évasion hors des goulots d’étranglement

Gestes de dépassement
 du dépassement
 surtout du dépassement

Gestes qu’on sent, mais qu’on ne peut identifier
 (pré-gestes en soi, beaucoup plus grands que le geste visible 
et pratique qui va suivre)

Emmêlements
 attaques qui ressemblent à des plongeons 
nages qui ressemblent à des fouilles 
bras qui ressemblent à des trompes

Allégresse de la vie motrice
 qui sape la méditation du mal
on ne sait à quel règne appartient
 l’ensorcelante fournée qui sort en bondissant
 animal ou homme 
immédiat, sans pause
 déjà reparti déjà vient le suivant 
instantané 
comme en des milliers et des milliers de vertigineuses secondes 
une lente journée s’accomplit 
La solitude fait des gammes 
le désert, les arabesques 
la multiplication indéfiniment réitéré

Signes 
non de toit, de tunique ou de palais
 non d’archives et de dictionnaire du savoir 
mais de torsion, de violence, de bousculement 
mais d’envie cinétique

Signes de la débandade, de la poursuite et de l’emportement
 des poussées antagonistes, aberrantes, dissymétriques 
signes non critiques, mais déviation avec la déviation et course 
avec la course 
signes non pour une zoologie 
mais pour la figure des démons effrénés 
accompagnateurs de nos actes et contradicteurs de notre réserve

Signes des dix mille façons d’être en équilibre dans ce monde mouvant qui se rit de l’adaptation
 signes surtout pour retirer son être du piège de la langue des autres 
faite pour gagner contre vous, comme une roulette bien réglée 
qui ne vous laisse que quelques coups heureux
 et la ruine et la défaite pour finir qui y étaient inscrites à l’avance 
pour vous, pour tous

Signes non pour retour en arrière
 mais pour mieux « passer la ligne » à chaque instant 
signes non comme on repense mais comme on pilote
 ou, ainsi qu’il arrive dans un grand encombrement quand automate inconscient, on se sent comme piloté

Signes, non pour être complet
 mais pour être fidèle à son transitoire
 non pour conjuguer 
mais pour retrouver le don des langues 
la sienne au moins, qui, sinon soi, qui la parlera ?

Écriture directe enfin pour le dévidement
 pour le soulagement des formes,
 pour le désencombrement des images 
dont la place publique-cerveau est en ces temps particulièrement engorgée

Faute d’aura, au moins éparpiller ses effluves.

***

Henri Michaux – Mouvements (Paris, NRF/Le Point du jour, 1951)

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Hommage ?


Evidemment je ne « vois » que depuis « moi », et j’y vois un (très) bel hommage à AW.
Quoi qu’il en soit, bien reçu, touchée et Merci.
Vive les forêts.

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Détails du jour vers le bord du tableau

2016-02-19 12.04.05

2016-02-19 12.03.54

Croire est une dissidence, ou bien une abdication. En tant que dissidence, elle se porte vers un horizon qu’elle n’envisage pas, qu’elle ne peut pas envisager, car le débordement des limites qu’elle incarne (croire n’est-il pas aussi un affect ? un emportement ?) ouvre des zones de résistance créatrices, des espaces littéralement « dérangés », inapprivoisables.
oooParce que croire n’est pas nécessairement être crédule ni donner voie à l’imaginaire, et c’est bien ce que Kierkegaard a tenté de penser. Miser sur l’impensable. Effectuer un saut. Se livrer à une discontinuité là où tout nous ramène sans cesse au continu. Etre absolument déraisonnable ne suffit pas. Il faudrait déplacer la ligne d’horizon… Changer de discours, de paramètres, d’angle de vue. Détourner le regard vers le bord du tableau, voir enfin ce qui se passe à la marge, là dans ce détail, changer de paramètres, d’alphabet, d’histoire de mémoire. p.175-176
Anne Dufourmantelle
Eloge du risque
Rivages poche, an 2014

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Suis passée au 15 CH

robe

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être dans la présence de chaque détail

agatha

Et s’il s’agissait plutôt de se perdre dans la forêt, sans demander à quiconque la route à suivre, et s’il s’agissait, oui, de vouloir se perdre… ne pas se retourner sur ses pas, ne pas attendre la clairière à tout prix, mais plutôt que vienne la nuit, l’obscurité. Comment retourner l’espoir sur le vif du présent, être dans la présence de chaque détail comme un entomologiste de la sensation, de l’évanescence, de ce qui surgit, de moins pensable, du plus équivoque parfois.
oooCette attention au présent, défait de l’alibi de l’espérance, me fait penser à certains films de Duras, à cette apparente immobilité de la caméra qui, imperceptiblement, déplace la lumière, le regard, et nous fait entendre une qualité de voix posée juste à côté du mot, de biais, en équilibre. C’est le risque qu’il n’y ait rien, du moins justement, rien de visible. Plan fixe. Une présence de dos. Prenez L’homme Atlantique par exemple ou même Agatha. « Vivre à distance de l’abattement comme de l’espoir » pourrait ressembler à cet espace-là, surexposé et pourtant secret. Un espace-temps presque immobile, comme en suspension où chaque mouvement prend un relief particulier, un accent à lui, singulier, inimitable. Et chacun des plans-séquences se découpe sur un temps inoubliable, qui se fixe en vous à tout jamais, vous qui regardez ce film sans comprendre pourquoi rien ne bouge, pourquoi si peu de gestes, de lumière accompagne ces mots prononcés de dos. Comment faire surgir du présent là où il n’y en a plus ? Il faut repartir et, dans ce secret, commencer. Il arrive que la vie nous accorde ce sursis, d’être présent, vraiment à ce qui apparaît, à ce qui se découvre. Se souvenir de Nietzsche, lorsqu’il tentait de penser la force comme ce qui s’expose sans protection et ainsi se révèle dans sa fragilité même, dans le combat. p.162-163
Anne Dufourmantelle
Eloge du risque
Rivages poche, an 2014

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Ce matin, les oiseaux ont chanté fort

pincerose
et le soleil a tapé pile.

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Thé (madeleine) avant départ

2016-02-08_14.58.19
Elle me disait quelque chose.
Je ne crois pas en avoir croisée d’autre depuis.
Je n’arrive pas à savoir si je la trouve belle (pas sûre).
Je n’arrive pas à savoir si je la trouve pratique (encore moins sûre).
C’est quand je me suis servie et que j’en ai mis (de nouveau) partout
que la scène m’est revenue.
Je m’en souviens très bien.
La baie vitrée pour profiter de la lumière.
Le son particulier d’un café en activité un après-midi de semaine avec ses figurants.
« Je ne suis pas hors de moi, ni en moi, mais à l’équilibre avec les autres corps qui bougent, les souvenirs qui flottent en parallèle comme des fantômes tendres. » (sic)
Il y a un an pile.
Il neigeait.

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Bureau

bureauvolant
aparté \a.paʁ.te\ masculin

1- (Théâtre) Monologue ou petite réplique théâtrale qui n’est pas entendu par les autres personnages de la scène mais uniquement par les spectateurs. — Note : Cette petite réplique permet au metteur en scène d’annoncer au public quelque chose qui peut ne pas être évident, comme les sentiments du personnage, ou d’ajouter une pointe d’humour.
oooPlus que le monologue, cʼest lʼaparté que Sénèque a pratiqué. — (Mariette Cuénin-Lieber, Corneille et le monologue, 2002)
2- (Par extension) Conversation secrète.
oooÇà ! souperons-nous ? demanda aigrement Coconnas, interrompant les apartés de son hôte. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, vol. I, ch. IV)

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Idiorythmie


contre-allée [à soi voire à contresens] \kɔ̃.tʁa.le\ féminin (orthographe traditionnelle)

Allée latérale et parallèle à une allée principale.
oooDans la contre-allée qui couronne la pente rapide au bas de laquelle frissonnent les eaux, […], je découvris une femme qui me parut encore assez jeune, […]. — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)

« la subtilité du pouvoir passe par la dysrythmie, l’hétérorythmie »
Roland Barthes, Comment vivre ensemble, p.40

[Pourquoi, malgré le bon sens du ciel, cette image me paraît maintenant comme à l’envers ?
Ou plutôt pas dans le bon sens.
Son sens à elle ?
A cause de ce montage mots/image ?
Pensant sincèrement à un heureux hasard quand j’ai assemblé les deux. Et là, maintenant, après coup, je la vois comme ça et n’arrive plus à la voir autrement.
Parce qu’ils sont reliés ?
Parce que l’image me tombe dessus et c’est elle, en avance sur moi (avec ce que je ne voyais pas mais qui est là), qui me donne envie de parler ?
Ou depuis l’envie des mots (que je ne connais pas encore) comme par miracle l’image m’arrive ? Le sentiment que je ne la cherche même pas.
D’abord l’image ou d’abord les mots ?
Ça va dans quel sens ?
Ou c’est moi qui relie et tout devient poreux ? ou tout est poreux alors je relie ?
Dans quel sens ça va ?]

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Dos crawlé


glisser \ɡli.se\ intransitif 1er groupe (conjugaison) (pronominal : se glisser)

Se mettre en mouvement, comme en coulant sur une surface lisse ou le long d’un autre corps.
oooL’adhérence de la roue sur le rail, qui agit le long du plan incliné en sens contraire du mouvement de translation, et produit la rotation de la roue en s’opposant à ce qu’elle puisse glisser sans tourner. — (Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, 1837, V.5, p.910)
oooOn patinait autour de lui. Des enfants, le col entouré de cache-nez écarlates, blancs, verts, bleus, glissaient et tournoyaient. — (Francis Carco, Brumes, Éditions Albin Michel, Paris, 1935, p. 95)
oooLe canot bascule sur le berthon, se met à glisser vers l’avant écrasant une trentaine de personnes et blessant grièvement à la jambe Isaac Lehmann. — (Philippe Masson, oooLes Naufrageurs du Lusitania et la guerre de l’ombre, Albin Michel, 1985, p.117)

(Figuré) Se déplacer avec légèreté et aisance.
oooElle semblait faite pour glisser, en robe blanche, dans des paysages liturgiques, une branche de lis ou un rameau d’or à la main. — (Octave Mirbeau, Le colporteur,)

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Promenade


C’est pas loin mais c’est différent.
J’aime.
Surtout l’hiver.
Grande douceur.
On s’est raconté.
J’étais heureuse de lui faire partager mes paysages.
La promenade et ses maisons comme suspendues, le port et Chez Pablo.
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L’amour fou

JRELLES

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Être au présent


tarkovski2
à venir
ellesdeux

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La lune était pleine ce matin,


Ce soir, je me dis, évidemment.

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Aile

elle

 

Capture d’écran 2016-01-24 à 13.51.38

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